Guerre civile au Pérou

Des immeubles en feu, des aéroports et des commissariats attaqués par les foules, des affrontements sanglants avec la police et l’armée, les Andes qui marchent sur Lima, une cinquantaine de morts… les médias internationaux nous dépeignent un Pérou en guerre civile. 

Tout ça existe évidemment, le pays semble dans l’impasse avec ses 6 présidents en 5 ans et une classe politique aussi corrompue et centrée sur elle-même que dans bien d’autres pays. Et les morts sont bien réels.

Mais notre quotidien de touristes ici – on squatte le blog des enfants pour vous en parler, puisque vous êtes nombreux à nous poser la question – c’est d’être entourés de Péruviens pacifistes et chaleureux. Jamais nous ne nous sommes sentis en danger. 

Les routes sont souvent bloquées sur l’une des deux voies, barricadées par des rochers, d’immenses troncs d’arbres, des tas de gravats, des pneus en feu, des barbelés. Et des rangs de Péruviens des Andes, assis sur l’autre voie, avec leurs milles couleurs, leurs chapeaux farfelus, leurs joues rougies et leurs sourires indéfectibles.

On ne compte plus les fois où l’on s’est levé avant 4h du matin pour se  déplacer avant le réveil des manifestants. Quand il est trop tard, les chauffeurs font des détours étonnamment créatifs pour contourner les barricades. Parfois, le bus s’arrête avant le blocage, on le traverse à pied, les gens nous sourient, et on reprend un transport de l’autre côté. Quand une ambulance doit passer, tous s’activent pour gérer le trafic et la laisser passer au plus vite.

On garde à l’esprit qu’on peut rester bloqué partout, mais on est bien partout ici, donc ce n’est pas un problème. On arrive finalement à aller où l’on veut, ou presque (Machu Picchu, on te guette).

Le tourisme s’est évidemment effondré dans les montagnes et dans la jungle : on est pratiquement seuls dans les auberges, les restaurants, les sentiers de randonnée, les ruines, partout. Déjà que c’est la saison basse normalement. On ne sait pas comment les gens font pour survivre, et pourtant ils gardent le sourire et achètent encore des fleurs. Et on se permet parfois – souvent, même, pour être honnêtes – de se réjouir d’avoir tout ce Pérou rien que pour nous.

Dans les grandes villes, il y a des manifs tous les jours, aux sons contrastés de « Dina asesina! » et des pouet-pouet joviaux des klaxons à air comprimé. On évitait ces manifs au début, ou plutôt la police qui les accompagnerait, mais finalement, c’est familial et paisible. Et il n’y a que quelques policiers motards pour gérer le trafic. Bien que l’envie soit très forte d’aller scander des « el pueblo unido… » avec eux, on reste quand même à distance pour rassurer nos mamans.

Tout ça pour dire qu’on va bien, qu’on se sent en sécurité. Qu’on ne côtoie jamais les images et récits qu’on lit dans les journaux occidentaux. Que le Pérou est incroyablement riche, par son peuple d’abord, sa beauté ensuite, et qu’on ne serait pas si malheureux si on devait rester bloqués un peu plus ici. 

Ariane et Guillaume